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Communiqué de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg – Arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne dans l’affaire préjudicielle C-432/23 concernant l’opposabilité du secret professionnel de l’avocat en matière fiscale

En sa qualité d’organe en charge de la protection des intérêts de la profession d’avocat et plus particulièrement du secret professionnel au Grand-Duché, l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg est intervenu volontairement dans une affaire judiciaire au support d’un cabinet d’avocats luxembourgeois auquel l’Administration des Contributions Directes avait enjoint de communiquer l’ensemble de la documentation concernant la consultation fournie à un de ses clients aux fins d’un échange d’informations sur demande avec une administration fiscale d’un autre Etat membre de l’Union européenne.

Dans cette affaire, la Cour administrative avait décidé de surseoir à statuer et de poser un certain nombre de questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union européenne au sujet de la compatibilité de la directive 2011/16/UE et de la législation nationale luxembourgeoise avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, plus particulièrement, avec la protection du secret professionnel de l’avocat garanti à l’article 7 de ladite Charte.

Le 26 septembre 2024, la Cour de Justice a rendu son arrêt, qui donne entière satisfaction à l’Ordre.

La Cour rappelle tout d’abord que le secret professionnel de l’avocat jouit d’une protection particulière, garantie par l’article 7 de la Charte et par l’article 8, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui se justifie notamment par le fait que les avocats se voient confier une mission fondamentale dans une société démocratique, à savoir la défense des justiciables. En confirmant sa jurisprudence antérieure, elle juge que la protection du secret professionnel recouvre également la consultation juridique et garantit nécessairement le secret de cette consultation, et ce tant à l’égard de son contenu que de son existence. Par ailleurs, la Cour précise que la protection particulière du secret professionnel s’étend sans distinction à tous les domaines du droit.

En conséquence de ce qui précède, la Cour conclut qu’une décision d’injonction, émise dans le cadre d’un échange d’informations sur demande en matière fiscale, et sollicitant d’un cabinet d’avocats la communication de l’ensemble de la documentation concernant une consultation fournie à un client en matière de droit des sociétés, constitue une ingérence dans le droit au respect des communications entre un avocat et son client.

Si le secret professionnel de l’avocat, comme tous les autres droits fondamentaux consacrés par la Charte, ne constitue certes pas une prérogative absolue, la Cour rappelle que toute éventuelle limitation doit être prévue par la loi, respecter le contenu essentiel du droit en question et satisfaire au principe de proportionnalité.

A cet égard, elle note que la législation luxembourgeoise actuelle (en particulier le § 177 (2) de la Abgabenordnung) exclut de manière générale de la protection du secret professionnel la consultation et la représentation fournie par un avocat en matière fiscale, à l’exception de ce qui est susceptible de relever du droit pénal fiscal. Aux yeux de la Cour, cette disposition et l’application qui en a été faite dans le cas d’espèce, loin de se limiter à des situations exceptionnelles, emportent une atteinte au contenu essentiel du droit au respect des communications entre l’avocat et son client, et donc une ingérence qui ne saurait être justifiée.

L’affaire reviendra maintenant devant la Cour administrative qui devra trancher en prenant en compte la décision de la juridiction européenne.

Le texte complet de l’arrêt en langue française peut être consulté sur le site internet de la Cour de Justice de l’Union européenne en cliquant ici.